source: L'Alsace
"No border", un campement pot-pourri"
20.Jul.02 - Hier s'est ouvert à Strasbourg un campement militant international rassemblant la mouvance antimondialisation.
Ni frontières, ni nations, ni contrôle social. Pour la liberté de mouvement et la solidarité entre les peuples !" : sous ce mot d'ordre s'est ouvert, hier à Strasbourg le long du Rhin au pied du pont menant en Allemagne, un "campement international" organisé à l'initiative de divers collectifs français, allemands, italiens, espagnols ou anglais engagés dans la lutte contre la mondialisation, le racisme, les exclusions et pour le soutien aux immigrés, en particuliers aux sans-papiers, etc.
2000 participants attendus
D'ici au 28 juillet, date de fin du campement, les organisateurs espèrent réunir quelque 2 000 personnes. Le rassemblement de Strasbourg s'inscrit dans la lignée de précédents organisés en Espagne, Slovénie, Allemagne, Pologne, etc. par le réseau "No border" (Sans frontières) constitué en 1998 après la réunion des ministres de la Justice et de l'Intérieur du G8 en Italie. Le choix de Strasbourg est lié à la présence des institutions européennes, la Cour européenne des droits de l'homme notamment mais aussi du SIS, le Système informatique Shengen qui centralise toutes les informations nécessaires à la surveillance des frontières extérieures de l'espace de libre circulation créé par l'Accord de Shengen. Un accord que les participants dénoncent comme un moyen de contrôle policier attentatoire aux libertés. Au cours de leur séjour strasbourgeois, les participants organiseront des activités et débats sur leur site et se manifesteront en ville ou à travers toute la communauté urbaine, particulièrement en direction des quartiers défavorisés où, chaque jour, une caravane se rendra pour prendre contact avec les habitants. Hier, ils n'étaient qu'environ 200 à camper le long du Rhin en attendant de nouveaux venus dans les heures et les jours à venir, comme Santiago et son amie Loréna, un couple d'Uruguayens arrivés sac au dos de Barcelone. "Nous sommes venus exprès pour rencontrer des groupes et des personnes avec qui nous sommes en contact via internet", explique Santiago.
Autogestion
Le campement à un petit goût de jamboree scout militant avec son organisation, équipe médicale, service d'accueil, garderie pour les enfants, commission information et bien sûr son incontournable assemblée générale quotidienne puisque le campement est libertaire et autogéré. Pour preuve, il n'a pas de porte-parole et chacun est invité à s'investir dans les activités collectives nécessaires à l'autogestion d'un lieu de vie prévu pour près de 2000 personnes, précise aux participants Le guide du campement. La notion même de chef est pour eux une incongruité. Le campement est ainsi divisé en six villages qui s'administrent eux-mêmes avec leur propre cuisine et leur propre assemblée de décision. Qualifiés "d'anarchistes" par les services de police strasbourgeois, les participants sont issus de toute la palette de la scène alternative : militants politiques, écologistes, anti mondialisation, tiers-mondiste etc. Des sensibilités que l'on retrouve dans les cuisines des différents "barrios" (quartier en espagnol) du campement qui se partage entre cuisine végétarienne c'est-à-dire avec légumes, oeufs et laitage, et végétalienne, strictement à base de légumes et de céréales. Assiettes et couverts jetables sont bien entendus proscrits. Dans le même état d'esprit, le campement qui pratique le tri sélectif de ses déchets, reproche à la municipalité de lui avoir fourni des toilettes temporaires chimiques alors qu'il souhaite des WC biologiques.
"Tous suspects"
Si le campement se veut strictement politiquement correct en matière de discrimination, "les attitudes sexistes, racistes ou homophobes n'ont pas leur place ici", explique un participant, l'une des premières initiatives a été de créer un "café non sexiste, espace réservé aux femmes". Enfin, le campement se veut branché et adepte de la société de l'information avec une radio interne, un site et un accès internet, une radio et un journal sur le web avec une batterie d'ordinateurs dans un vieux bus anglais pour gérer l'ensemble. Par contre, les journalistes ne sont pas les bienvenus et sont classés dans la même rubrique que "les flics". Il est conseillé aux participants "en cas de présence de journalistes à l'intérieur du campement" de les accompagner "à la tente d'accueil". Une tente où se dresse une banderole : "Nous sommes tous et toutes suspects". Et les journalistes encore plus.
AFP Michel Arnould